Brouillard

 

 

Depuis l'aube des temps à nous il s'impose.
Fin rideau de minuscules gouttes de pluie
Au travers duquel, de peur, nul regard n'ose
Percer l'envers mystérieux où réside l'ennui.

Membrane translucide, ou parfois diaphane,
Elle dissimule ce que nous aimerions bien voir,
Tel un mur totalement hermétique au profane,
Qui, malgré l'effort, demeure dans le noir.

Opaque, brutal rempart où rien ne passe,
N'offrant d'autre possibilité que le repli,
Alors qu'en nous s'installe, de guerre lasse,
L'insupportable doute, unique lien de vie.

Gris, couleur muraille aux tristes reflets,
Miroir de l'âme lorsqu'il se fait tristesse,
Nul n'est besoin, dès lors, d'entrevoir l'aspect
Tant sa réponse laisse apparaître la détresse.

Noir d'encre comme une nuit sans lune,
Cette éprouvante douleur en nous réagit
Faisant naître l'atroce pression d'amertume,
Celle de la déchéance annoncée de l'esprit.

Lorsque tout semble écrit, voire perdu,
Que le regard de larmes amères se voile,
L'âme abandonnée vacille, tourne éperdue.
Fuir, à tout prix, ou crever cette obscure toile.

Et puis, soudain, un pinceau de lumière,
Cette faible lueur que l'on espérait tant.
L'obstacle enfin s'efface. Tout se libère.
Majestueux, apparait un jour éblouissant.

Serait-ce l'instant d'une guérison salvatrice ?
Aurai-je ainsi une autre chance de survie ?
L'amour, me délivrera-t-il de ce supplice ?
Par cette quête au fond de moi, de ma vie ?

Guy Vigneau