Rêverie Polynésienne

 

 

À rêver de vous, eaux turquoise et limpides où se reflètent les silhouettes inclinées de vos graciles cocotiers. Odorantes frondaisons de vos élégants frangipaniers aux fleurs délicates. Plages de sable d'or, écrasées de chaleur où, paresseusement, vos envoûtantes vahinés fleuries laissent bronzer leurs corps alanguis de déesses. Je me prépare à vous rejoindre et suis préparé pour le grand voyage…

Il n'est de vision plus mirifique que l'arborescence de vos lagons, bordés de coraux rouge sang où des myriades de poissons multicolores jouent au creux de vos récifs et des vagues bercées par les courants du large. Chant, ô combien mélodieux de leur reflux mêlé au bruissement des coquillages roulant sur le sable…

Demain me verra heureux d'être auprès de vous, accueillantes îles sauvages et paradisiaques où, lorsque je vous aurai rejointes, à vous je m'abandonnerai… Vie de résignation ? Surtout pas, mais, existence de rêve qui me verra naviguer inlassablement en vos lagunes à bord de vos pirogues, le front ceint d'une couronne de fleurs de tiaré…

La pêche traditionnelle, la collecte de fruits gorgés de saveurs, seront mes activités premières afin de vous approvisionner gracieusement en remerciement de votre chaleureux accueil. Je passerai mes jours à m'extasier devant vos reliefs verdoyants réfugiés au coeur de votre nature exubérante grâce aux brumes de chaleur, ainsi que vos côtes frangées d'écume blanche…

Le soir, au clair de Lune, je savourerai sur le sable de vos rivages enchantés, votre délicieux Tamara traditionnel et, à l'abri des feuillages filigranés des filaos complices, nous chanterons en chœur les Hyménés contant vos légendes…

Je m'éblouirai des danses sensuelles de vos gracieuses vahinés, s'offrant en spectacle, la taille ceinte de paréos bariolés, aux côtés d'hommes harnachés de plumes et de riches tatouages Maoris, qu'accompagneront les joueurs d'ukulélés et de toérés...

Ô, somptueux paradis terrestre dont je connais chaque îlot, chaque motu et d'où s'élèvent vos chants, d'où me parviennent d'enivrantes exhalaisons, je souhaite ardemment devenir le plus heureux de vos habitants, le plus fidèle de vos compagnons...

C'est ici, près de vos rivages, d'où je contemplerai une dernière fois le ballet silencieux de vos frégates, auprès de Paul Gauguin, peintre talentueux et de Jacques Brel, poète passionné, que je finirai mes jours sans aucun regret d'avoir quitté à jamais ce monde qui se veut moderne, celui des hommes ordinaires...

Guy Vigneau